Maire et sapeurs-pompiers : histoire de liens multiples

Opérationnel - Le 19 septembre 2019

[MAGAZINE] Comment sensibiliser les maires aux enjeux de sécurité civile et, ensuite, transmettre cette culture à la population? Rencontre autour de ces thèmes entre élus et sapeurs-pompiers au Congrès national, le 18 septembre 2019.

Maire et sapeurs-pompiers : histoire de liens multiple

Des communes entières sous les eaux, des dizaines de milliers de véhicules immergés à évacuer et à garder et, bien sûr, des milliers d’habitants bloqués chez eux, sans chauffage ni nourriture. 
Projetées en ouverture du Forum des maires du Morbihan, les images de la simulation d’une crue centennale touchant la petite couronne parisienne avaient de quoi marquer les esprits. L’idée était de souligner les conséquences d’une crise majeure et la nécessité de s’y préparer. 
«On peut souhaiter ardemment ne jamais avoir de pépin mais c'est un pari que je ne prendrai jamais», lance ainsi l’ancien directeur général de la Sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), le préfet Jean-Paul Kihl, qui participait à cette rencontre entre élus locaux et responsables des Sdis et de l’État. 

 «Hors des crises, on oublie la sécurité civile» 

De fait, quasiment tous les maires participants avaient eu à faire face à des situations graves. Ainsi, Bernard Hilliet, le maire de Quiberon, se souvient de l’explosion qui a ravagé le centre de sa ville au beau milieu d’une nuit de juillet 2018. «Très rapidement», les premiers sapeurs-pompiers sont sur place et, bientôt, «une armée de pompiers arrive, c’est très impressionnant ». Lui-même a dû «ouvrir un espace, prendre les bus de la ville et réveiller les chauffeurs», avant de gérer l’information de la population. Pourtant, «en dehors des périodes de crise, on a tendance à oublier la sécurité civile», note Christine Le Strat, la maire de Pontivy. 
Un constat partagé par le maire de Grand-Champ, Yves Bleunven, qui «se rend compte, en tant que président de l’Association départementale des maires, à quel point il est important de mobiliser les élus autour de la problématique de la sécurité civile».
«Ceux qui seront là en 2020 auront une proposition d'accompagnement un peu plus forte», mais la difficulté réside dans la «masse d'information» à laquelle un nouveau maire est confronté et qu’il «ne peut pas forcément ingérer, sauf s’il est face à cette question malheureusement», ajoute l’élu, également premier vice-président du conseil départemental. 

L’enjeu de la formation des maires 

Faudrait-il que certaines structures, comme le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), proposent des formations aux élus?, s’interroge le lieutenant-colonel Christophe Guegan, chef du groupement formation du Sdis56. Une fausse bonne idée selon Bernard Hilliet, pour qui les nouveaux élus ne se rendront pas forcément compte de l’importance de ces formations si d’aventure elles étaient proposées. Pour sa part, s’il a pu être sensibilisé, c’est, d’une part, parce qu’il a «trouvé la bonne personne» dans son équipe» et, d’autre part, parce qu’il a «reçu la visite du président et d’une une bonne partie de la hiérarchie du Sdis56». 
Ce «contact régulier» lui a «apporté toute une série d'informations [qu’il ne] maitrisait pas et [qu’il] devait prendre en compte.» 

Favoriser le volontariat

Une proximité favorisée par l’existence de «petits centres dont les pompiers sont ancrés dans un territoire qu’ils connaissent bien», note Christine Le Strat. Ce maillage permet aussi de favoriser le volontariat, autre piste de réflexion de cette rencontre. 
Avec les intercommunalités, le volontariat est en effet plus dur à valoriser, analyse le colonel Hugues Derégnaucourt, vice-président de la FNSPF et DDSIS de l’Ain. «Un SPV qui, naturellement, pouvait rendre service au centre de secours de sa commune, aujourd’hui, avec l'intercommunalité, c'est plus difficile. [...]. Ce n'est pas avec des grosses casernes composées de beaucoup de professionnels mais à 30 minutes qu'on arrivera à résoudre les problèmes de proximité", note-t-il. 
Si les maires doivent être sensibilisés aux problématiques de sécurité civile, ils doivent aussi transmettre cette culture à leur population. 
«Nous avons le devoir de réagir, de valoriser le travail du sapeur-pompier et de la sécurité civile pour avoir davantage de volontaires», martèle Christine Le Strat. Dans sa commune, elle valorise «l’accès de nos employés à leur fonction de pompier» et plaide pour une reconnaissance accrue du statut du SPV. 

La réponse ne peut être que collective 

Pour les jeunes, il y a déjà «beaucoup d’interventions de sapeurs-pompiers dans les collèges et les écoles», ajoute le président du Casdis56, Gilles Dufeigneux. Elles sont organisées aussi bien par les unions départementales de la FNSPF que par des chefs de centre sensibilisés à cette question. Surtout, le lien est maintenu par les 250 JSP répartis en neuf sections, ce qui constitue une «initiation à la sécurité civile formidable». Une mobilisation globale de la population nécessaire car, «dès qu'on est sur un phénomène qui prend de l'ampleur, la réponse ne peut être que collective», observe Jean-Paul Kihl. Selon lui, cette solidarité doit s’accompagner d’un ancrage local. «La notion de territoire est importante. On ne fait pas de plan ou de prévisions in abstracto, mais en fonction d’un territoire, avec sa population et ses risques», conclut-il. 

Texte : Matthieu Guyot de Saint Michel
Photos : Stéphane Gautier


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